Pierre-Rouge 19 : De l’Immaculée conception à Radio Aviva

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Les locaux de Radio Aviva - L'octroi du chemin de Castlenau se trouvait non loin de là
octobre 2018 (collection personnelle)

En 1829, Pierre-Bienvenu Noailles (1793-1861) créait à Verteuil la première fondation des religieuses de l’Immaculée conception, au sein de la Sainte-famille de Bordeaux, qu'il avait fondéé en 1820. L’abbé destinait cette branche de la congrégation à l’éducation de jeunes filles distinguées. La particule qui lui est parfois prêtée, par confusion avec une famille d'ancienne noblesse, n'a pas lieu d'être. L'abbé Noailles a été déclaré vénérable par l'Eglise catholique en 1988. L'association de la Sainte-famille existe toujours, en revanche les soeurs enseignantes de l'Immaculée conception ne semblent pas avoir perduré.

Gravure tirée de la Vie abrégée du Bon père Pierre Bienvenu Noailles, d'après son portrait par M. de Gallard
(source Gallica)

Ami de Monseigneur Thibaut depuis le séminaire Saint-Sulpice à Issy, l'abbé Noailles est fait chanoine honoraire de la cathédrale de Montpellier en octobre 1835. C'est sans doute la relation personnelle entre les deux hommes qui l'a conduit à faire une fondation à Montpellier. Malgré leur public de jeunes filles distinguées, c’est pourtant dans le rebutant voisinage des tanneurs et des abattoirs que les religieuses de l'Immaculée conception s’installent à Montpellier en 1837, au 16 de l’actuelle rue Ferdinand Fabre.

Anciens bâtiments d'enseignement de l'Immaculée - octobre 2018 (collection personnelle)

Les débuts semblent assez timides, dans un ensemble de locaux disparates dont les soeurs doivent se contenter pendant plus de trente ans. A Montpellier, l’Immaculée conception a pris la forme d’un pensionnat, installé dans des locaux de style néo-roman, organisés autour d’un cloître, construits vers 1870-1875. 

Chapelle de l'Immaculée conception (carte postale ayant circulé en 1893 - collection personnelle)

La chapelle serait due à l'architecte Jules Margouires, qui est de façon certaine l'auteur du logement de l'aumônier en 1876 d'après l'inventaire. 

carte postale envoyée en 1916 (collection personnelle)

Le recrutement ne doit pas toujours se faire sans peine, car en 1889, moins d'un mois avant la rentrée scolaire fixée au 3 octobre, L'Eclair publie le 4 septembre un texte rappelant « Aux familles qui veulent bien leur confier leurs enfants qu’elles reçoivent au pensionnat des élèves pensionnaires, demi-pensionnaires et externes, à tous les âges et à des prix modérés ». Le même texte est encore publié le 9, le 11 et le 20 septembre. Aucune autre institution religieuse ne faisait pareille publicité.

En 1901, le pensionnat accueillait 29 religieuses et 86 élèves, scolarisées jusqu’au brevet. Dissoute en 1903 parce qu’elle ne s’était pas conformée à la loi du 1erjuillet 1901 sur les associations, la congrégation a cependant poursuivi ses activités. Entre les deux guerres, le pensionnat scolarisait des jeunes filles qui étaient pour beaucoup des pensionnaires des villages de l’Hérault, voire des colonies, de la primaire au baccalauréat. Les classes enfantines accueillaient aussi des garçons en externat jusqu’à l’âge de sept ans. 

Mgr Cyprien Tourel, évêque de Montpellier de 1959 à 1976 - vers 1965 (photo Bernard Sebert)

Dès 1961, les religieuses avertissent Monseigneur Tourel de leur désir de fermer l’établissement pour se regrouper ailleurs. Les classes de lycée sont trop peu fournies, les élèves abandonnant massivement la scolarité après le BEPC. Ce n’est qu’à Pâques 1969 que la décision est prise : les élèves de la 6à la 3iront à Sainte-Odile pour la rentrée 1969. Pour beaucoup de familles attachées au caractère familial de l’établissement, dont ma grand-mère et ma mère étaient, c’est un déchirement. 

carte postale envoyée en 1922 (collection personnelle)

Ma mère se souvient avec bonheur de ses années de scolarité à l'Immaculée conception : "Pour les classes, nous avions ces bureaux en bois avec l'encrier en porcelaine blanche et encre violette, des porte plumes sergent major et des buvards roses pour faire l'écriture avec "les pleins et les déliés. Pour apprendre à lire et à écrire nous avions des lettres en plastique souple bleues et jaunes (de la toile cirée un peu brillante) différentes pour les voyelles et les consonnes. En 6e j'avais une soeur super dynamique et très gentille qui s'appelait soeur Emma." Elle se souvient aussi qu'il fallait faire la révérence devant la mère supérieure. 

Les classes se trouvaient notamment autour du cloître (carte postale, collection personnelle)

Sainte-Odile doit rapidement faire des travaux pour faire face à l’afflux d’élèves. L’immaculée conserve encore quelques années ses classes élémentaires, avant de fermer. Ses locaux ont connu plusieurs usages par la suite, dont la synagogue et la radio associative Aviva dont il sera question plus loin. Elle a aussi accueilli la maison de l’environnement, qui hébergeait plusieurs associations écologistes. La décision brutale de fermeture prise en 2002 fit tanguer l’alliance fragile entre Georges Frêche et les Verts à la mairie.

En 2003, des travaux sont lancés pour aménager un jardin public, une crèche de 48 places baptisée Pinocchio et une halte-garderie de 25 places, l’île aux trésors. A l’étage, c’est la maison des seniors qui s’installe à la fin des travaux en 2004. A l'automne 2018, de nouveaux travaux étaient en cours. 

L'ensemble des sources utilisées pour l'écriture de ce feuilleton est disponible ici. 

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