Polar : 2- Elizabeth George ou la perfection des voix intérieures



Il y a quelques années ma tante Sylvie, qui me croyait sans doute des goûts plus littéraires, s'est étonnée de me voir lire un des tomes de la série dédiée à Thomas Linley et Barbara Havers. "Tiens, tu lis ça toi, j'aurais pas cru". Elle-même lit du thriller et bien d'autres choses avec éclectisme, à la suite d'un père lui aussi grand lecteur.

Et bien oui, je l'avoue j'ai lu toute l'oeuvre policière d'Elizabeth George et à part J.K. Rowling lorsqu'elle écrit sous le nom de plume de Robert Galbraith (j'y reviendrai dans un futur post), je ne lui connais pas d'égal dans le polar psychologique.

En classe de 5e, une prof de français que je détestais par ailleurs nous a fait lire Rebecca de Daphnee Du Maurier, dans la belle traduction classique de Denise Van Moppès. Je l'ai relu huit fois depuis, avec un plaisir jamais démenti, dont une fois en anglais. Je crois que c'était la première fois que j'avais l'impression d'être dans la tête d'un personnage, de vivre ses doutes, sa peur du regard des autres. Et cela m'a d'autant plus étonné que c'était une femme, adulte et qui vivait dans un monde très différent du mien.

J'ai lu depuis toutes sortes de romans, subit en prépa l'éreintement du roman psychologique classique par la critique structuraliste. Et puis à l'été 2005, à la FNAC de Montpellier, j'ai trouvé Le lieu du crime d'Elizabeth George sur une table. Je me serais contenté d'un classique whodunit à l'anglaise comme je les aimais déjà. Et de ce point de vue le contrat était largement rempli, avec des personnages d'enquêteurs bien campés dans un contraste classique : Linley, l'aristocrate bien élevé et Havers, sa subordonnée qui ignore toute forme d'obéissance ou de discipline personnelle. Le rythme était enlevé, l'envie de tourner page après page était irrésistible. J'en ai lu cinq autres cet été là.

Mais plus que tout cela, ce qui fait le talent particulier d'Elizabeth George, c'est d'entrainer son lecteur dans la tête de chaque personnage, avec un don pour l'empathie certain et une manière de donner à chaque personnage une voix intérieure immédiatement reconnaissable.

Chaque roman présente une intrigue autonome, mais l'évolution des personnages principaux et de leur relation mérite vraiment une lecture dans l'ordre. Il faudrait donc commencer par Enquête dans le brouillard.

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L'ancienne traduction de Rebecca est facile à trouver en occasion. Je n'ai pas pu me faire à la nouvelle, qui me tombe des mains dès l'incipit par sa volonté de se démarquer de l'ancienne et produit un français saccadé sous prétexte de plus grande fidélité à l'original.


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