Le procès Daygouy 9- Les dépositions du 21 novembre 1807

Coubisou vu du Bousquet, fin des années 1990

Le 21 novembre 1807, dans la salle d'instruction du tribunal d'Espalion, de nouvelles dépositions viennent compléter ce que l'on sait des événements de cette soirée. Je ne les citerai pas toutes et encore moins en entier, de peur de lasser le lecteur.

Pour la première fois, on entend Catherine Delous, la veuve Pègues chez qui se déroulait la fameuse veillée. Elle nous apprend comment a commencé la soirée.
"Dans la nuit du dix sept au dix huit octobre dernier vers les huit à neuf heures du soir, Antoine Pègues son fils étant à boire bouteille dans sa maison avec Jean Lacroix de Falguières, tonnelier, que trois jeunes gens de Labro étant entrés furent invités à boire un coup. Qu'ensuite entrèrent deux filles employées par Daigouy à ramasser les châtaignes. Que peu de temps après Anne Garrigues femme Daigouy parut dans la basse cour de la déclarante, proféra quelques insultes contre le fils de celle-ci disant "foutus voleurs, gueux, coquins". Qu'à ces propos injurieux Antoine Pègues sortit sur la porte où il y a balcon, que quelques instants après la voix de Daygouy le père se fit entendre, donnant le défi à Antoine Pègues de descendre." La suite colle avec ce que l'on sait déjà du côté des témoins de la veillée, même si la veuve Pègues n'est pas très affirmative sur l'auteur du jet de pierre dont a été victime son fils Antoine.

Elle est en revanche catégorique sur un point : il y a eu deux coups de fusil. Le clair de Lune permettait de bien voir ce soir là, dit-elle. Et elle dit avoir vu de ses yeux Daygouy tirer un coup de feu sur Pierre Costes qui s'effondra tout près de l'endroit où elle était. Et elle a cru que le deuxième coup de fusil, toujours tiré par Daygouy de la fenêtre, visait Jean Lacroix. Elle ajoute ceci, qu'elle "sait par ouï dire que le domestique dudit Daigouy, appelé Jean Pègues, fils de la déclarante, avait dit à Jean Lacroix "retirez-vous, on vous tuera tous".

Le témoignage de Jeanne Bringuier n'apporte que quelques détails nouveaux, comme le fait qu'Anne était occupée à coudre lorsque Jean-Baptiste Daygouy lui demanda d'aller chercher les deux Elizabeth, parce qu'il ne convenait pas qu'elles sortissent de nuit. Elle est convaincue sans l'avoir vu qu'un seul coup de fusil a été tiré par Jean-Baptiste. Elle confirme la sortie nocturne de Daygouy père et fils avec leur mystérieuse cassette. Mais elle accrédite aussi l'idée qu'Anne Garrigues ignorait jusqu'au matin du lendemain que quelqu'un était mort dans l'affaire puisque c'est un oncle d'Anne Garrigues qui les en avertit à ce moment là, alors qu'Anne s'habillait pour aller à la messe. Jeanne Bringuier nous apprend encore que les deux Elizabeth ne sont pas rentrées après la rixe.

Le témoignage d'Elizabeth Pouget est intéressant à plus d'un titre. Elle explique comment les deux jeunes filles se sont retrouvées à danser chez la veuve Pègues. C'est une commission d'Anne Garrigues, qui les a envoyées chez Pègues vers huit heures et demie pour avertir qu'elle avait sorti son pain et qu'il fallait que Pègues, le fils ou la veuve, ce n'est pas clair, vienne chauffer le four. En entrant, elle furent invitées à boire du vin blanc par des jeunes gens qui étaient déjà à boire. Elle refusèrent d'abord, disant qu'elles étaient pressées de rendre réponse à leur maîtresse. Elle furent invitées à revenir, en leur faisant espérer quelques danses. Elizabeth Pouget se rendit alors auprès de Jeanne Bringuier, voulant la convaincre de venir danser pour dissiper la peine causée par la nouvelle de la mort de sa soeur.

Elizabeth Pouget dit n'avoir accepté qu'à contrecoeur de danser. Les jeunes gens lui auraient promis quelques noix et quelques pommes. C'est du moins ce qu'elle déclara le lendemain à la sortie de la messe à Anne Garrigues et à sa fille Marie Daygouy.

Le dernier témoignage est celui d'Antoine Pègues, le fils de la veuve, celui avec lequel furent échangés les insultes et qui reçut un projectile sur la tête qui le fit saigner et le mit hors de lui. Son propos ne nous apprend rien de nouveau. Comme sa mère, Antoine Pègues dit qu'il y a eu deux coups de fusil et est affirmatif sur le premier : il a vu Jean-Baptiste tirer sur Pierre Costes.

Tout accable Jean-Baptiste et le procès semble ne devoir être qu'une formalité. Seulement voilà, Jean-Baptiste a disparu depuis ce soir où il a quitté nuitamment sa maison avec son fils et la petite caisse en bois sous le bras. Et depuis ce jour, nul ne semble savoir où il se cache.

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