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La Solitude de Nazareth, carte postale circulée en juillet 1977 (collection de l'auteur) |
Me voici arrivé au terme de ce feuilleton consacré à l'histoire du quartier de Montpellier où j'ai grandi. Mais je n'en ai pas fini avec ce sujet, encore moins avec l'histoire de Montpellier.
Dans quelques mois, des éléments de ce feuilleton deviendront un livre de promenade dans le quartier Beaux-Arts-Boutonnet-Pierre-Rouge.
Il est en fait bien difficile d'arrêter un tel travail. Le sujet n'est pas épuisé, le quartier continue à évoluer. Chaque mois je découvre de nouvelles cartes postales, photos anciennes ou références documentaires. J'en réserve les plus intéressantes pour le livre. Et il faut faire des choix.
Esprit de fête
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Carnaval, char du 81e régiment d'infanterie, carte non datée (collection de l'auteur)
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Je ne suis pas un nostalgique. La vie n'était pas plus belle parce que j'étais plus jeune. C'est l'amnésie que je refuse, pas le changement. Je n'ai pas connu la tradition du mardi gras qui consistait à se rendre l'après-midi à Boutonnet pour faire voir son déguisement et admirer celui des autres tout en dégustant des oreillettes et des bugnes. Cela ne m'empêche pas d'éprouver du plaisir à l'évoquer et à imaginer ce que cela pouvait être. Et on peut heureusement toujours manger oreillettes et bugnes.
Le festival des fanfares montre que le quartier n'a pas perdu son sens de la fête. Le quartier des abattoirs était considéré comme un bastion républicain tôt sous la IIIe République. Pour fêter l'anniversaire de la République, de grandes fêtes populaires étaient organisées le 22 septembre.
Un article de la gazette des bains de mer de Royan en rend compte pour l’année 1894. « La date du 22 septembre a été fêtée partout à Montpellier, mais l’Abattoir, la cité Lunaret et la Pierre-Rouge se sont particulièrement distingués et leurs réjouissances ont été des plus brillantes. Toute la journée du samedi, une foule énorme avait envahi la place des patriotes (il s’agit de l’actuelle place Emile Combes, à ne pas confondre avec la place de Port-Marianne qui a reçu ce nom voici quelques années). Du reste, le temps était splendide et la gaité était rayonnante dans tous les yeux. A onze heures et à dix heures (du soir), un apéritif fraternel fut offert au cafe Flamand aux conseillers municipaux du quartier MM Haro et (Frédéric) Rouquette. On but à la prospérité de la République et aux représentants de la ville. M. Rouquette prit la parole, et au nom de son collègue et au sien, remercia les organisateurs de la fête (…).
Le lendemain, dimanche, un grand bal champêtre fut organisé. La musique alla prendre les conseillers municipaux précités à leur demeure et joua La Marseillaise. Le bal a été très réussi et a eu un entrain inimaginable. La place était éclairée à giorno. Une quête pour les cantines scolaires a été faite dans le public. »
Frédéric Rouquette était le père de l'écrivain dont j'ai parlé ici et dont la maison restaurée et divisée a perdu la plaque qui honorait sa mémoire. Et cette perte est comme une deuxième mort pour l'écrivain presqu'oublié.
Les belles demeures de quelques uns ont-elles été remplacées par des résidences ? J'aurais aimé plus d'arbres, plus d'imagination et peut-être que l'une d'entre elles ait été préservée comme un témoignage du temps passé, un musée d'un certain art de vivre bourgeois. Mais je préfère que la ville se reconstruise sur la ville plutôt que de voir ce qui nous reste de vignes et de garrigues disparaître sous le morne parpaing de la maison individualiste.
Les quatre saisons de la Pierre-Rouge
Si le changement climatique extrémise des événements plus fréquents, les pluies spectaculaires existaient déjà du temps de mon enfance.
Je me souviens d'avoir été souvent impressionné par la force du vent. J'ai vu, alors que j’avais quatre ou cinq ans, une partie d’un grand arbre s’effondrer sur l’avenue de Castelnau à la hauteur de l’actuel SESSAD « La Cardabelle ». Dans ma chambre d’enfant, je regardais, mi fasciné mi inquiet, le spectacle de la pluie. Etait-ce un grand pin parasol ou un cèdre, je ne sais plus.
En août 2005, alors que la place des Beaux-arts venait d’être refaite à l’occasion des travaux de la ligne 2 du tramway, un micocoulier de 30 mètres s’abattit sur la place, déraciné. Cette fois, ce n’était pas le vent qui était en cause, mais la pluie, qui avait fait s’accumuler de grandes masses d’eaux dans la ramure fragilisée. Heureusement que la pluie avait fait déserter la place, car l’arbre s’est effondré à là où, par beau temps, se trouvent terrasses de café et étals du marché. Les services municipaux n’avaient pas diagnostiqué de problème particulier.
Avant les travaux qui ont augmenté les capacités de drainage le réseau pluvial, je me souviens d'avoir vu le carrefour de la Pierre-Rouge submergé plusieurs fois. Mon grand père était alors habillé de caoutchouc vert des pieds à la tête, mais rien ne l'aurait empêché de sortir, ne serait-ce que pour aller voir si Mademoiselle Deltour avait besoin d'aide avec son rez-de-chaussée inondable.
Je me souviens en automne des nuées d'oiseaux, les étourneaux, en grappes compactes vers Toussaint.
Mais pour peindre l'intensité du ciel d'hiver, je préfère laisser la parole à Valéry Larbaud : "En hiver, le ciel du Nord vient parfois s'interposer entre la ville et le bleu métallique de la voûte méditerranéenne. Ciel d'un gris lumineux, mais épais et profond, et abondant, laissant traîner des nuées blanchâtres sur les collines, parmi les maisons blanches à terrasses et les bosquets de chênes verts et de pins maritimes, et ces arbres très hauts, aux mille petits rameaux serrés les uns contre les autres, rigides, qui forment un mur épais, tandis que plus haut les grosses branches développent largement de sombres plumages, des dômes, des éventails, de longs écrans verts, insensibles aux changements des saisons, et qui résistent au vent : grandiose ombrage perpétuel, curieusement inutile pendant que ce ciel demeure sur nous. De l'esplanade, on voit les deux rangées de platanes de la route de Nîmes, dénudées, hautes, d'un brun rougeâtre sur l'horizon blanc."
La neige était rare, j'ai une seule photo, bien floue, de ma mère enfant jouant dans l'ancien chemin de Castelnau. Le journal de l'année 2000 de ma grand-mère m'apprend qu'elle est restée bloquée par la neige le 14 décembre, mais dès le lendemain elle pouvait à nouveau aller faire ses courses à pied chez Champion (l'actuel Market de l'avenue de la Justice de Castelnau).
La ZAC François-Delmas, un morceau de ville en devenir ?
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Rue du Pont de Castelnau, à droite l'ancienne station service des Malautières - février 2019 (cliché de l'auteur) |
A la fin du mois de février 2019, je suis allé avec mon père et ma chienne photographier les terrains de ce qui était alors envisagé comme la future ZAC François-Delmas. Quelques pavillons isolés sur des terrains en surplomb du Lez, une casse, l’ancienne station de service des Malautières qui continue son activité comme garage et un ancien terrain maraîcher occupé par un SDF. Cela n’a l’air de rien ces trois triangles de terrain coincés entre le Lez, le cimetière Saint-Lazare, la voie ferrée et la route de Nîmes. C'est assez insolite si près de l'entrée de ville de Castelnau, devenue si dense.
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rue du Pont de Castelnau - février 2019 (cliché de l'auteur)
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Pourtant, vers la fin des années 2020, il aurait dû s’élever près de 700 logements sur ces 9 hectares de terrains, mais aussi des commerces et des bureaux. Depuis 2008, il existait à cet endroit un périmètre d’études afin de préparer cette urbanisation. La friche boisée largement inaccessible aux promeneurs où se côtoyaient autrefois baigneurs et bugadières devait devenir un parc de 4000 m2. Afin de limiter le risque d’inondation, 30% des parcelles auraient été laissées en pleine terre. Enfin, deux immeubles plus hauts devaient ponctuer l’entrée de ville, prélude à la requalification de l’avenue François-Delmas, largement hostile au piéton dans sa deuxième moitié, en vrai boulevard urbain, dans la continuité de ce que la ligne 2 de tramway a fait à Castelnau-le-Lez tout au long de l'avenue de l'Europe.
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rue du pont de Castelnau vers la voie ferrée - février 2019 (cliché de l'auteur) |
Dans le document d'urbanisme de 2025 (le PLUI), il n'apparaît plus qu'une zone de 2 hectares pour la construction d'immeubles collectifs au lieu des 9 prévus par la municipalité précédente. Je n'ai pas pu avoir plus de détails malgré l'obligeance du comité de quartier des Aubes.
Un projet de livre et une conférence à venir
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Projet de couverture |
Deux événements à venir le jeudi 13 février prochain : - Lancement d'une campagne de souscription pour le livre de 196 pages tiré du blog et de tout ce que j'ai découvert depuis. Plus d'informations à venir.
- Une conférence sur l'histoire des lieux qui abritent aujourd'hui la cité scolaire Françoise Combes.
Dans l'amphithéâtre de la cité scolaire (4 rue du 81e régiment d'infanterie), j'évoquerai l’histoire des différentes fonctions occupées par les locaux de la cité scolaire : cimetière juif - maison de campagne d’une riche famille protestante – octroi - première école normale de filles - petit séminaire - petit lycée - caserne du 81e régiment d’infanterie - hôpital temporaire – université pour soldats américains en attente de démobilisation – caserne – lieu de mémoire de la seconde guerre mondiale – école du commissariat de l’armée de terre…
Bonjour,
RépondreSupprimerJe me permets de vous contacter car je travaille aux repérages du prochain film de Bertrand Mandico, intitulé Roma Elastica et produit par Atelier de Production.
Le tournage est prévu entre les mois de mai et juin. Les dates vont se préciser prochainement.
Le film suit le parcours d'une actrice lors d'un tournage de film à Rome dans les années 80.
Nous sommes à la recherche de plusieurs décors assez difficile à trouver sur Montpellier, notamment des maisons de maîtres, hôtels particuliers ou immeubles n'ayant pas été rénovés, voire désaffectés.
Puis je vous préciser ma recherche par téléphone ou email?
N'hésitez pas à me contacter,
Merci beaucoup!
Mathilde Cheval
Responsable des Repérages
06 71 71 58 71
chevalmathilde@gmail.com