Feuilleton Veaugeois 20 : frustrations, impasses et petites pépites d'une recherche en train de se faire 2/2


Ce post rend compte en direct de la poursuite de mes recherches en archives sur les générations récentes de la famille Veaugeois. Pour l'épisode immédiatement précédent, c'est ici.

archives municipales de Caen
J'ai quitté Saint-Lô ce matin vers 8h30, direction Caen. J'ai d'abord rendu visite à la petite salle des archives municipales. Je ne savais pas trop ce que je pouvais y trouver mais l'archiviste m'a mis sur la voie avec l'annuaire des commerçants de Caen. J'ai commencé avec l'édition de 1925, l'année où Georgette s'inscrit au registre du commerce. Cette année là, au 49 rue d'Auge, le cordonnier Boucharain est seul à cette adresse. L'annuaire de 1926 manque. En 1927, avec le cordonnier Boucharain on trouve bien "Sebert couturière", mais sa présence est éphémère puisque dès l'année suivante, elle est remplacée par Leray, eaux de vie et vins. A-t-elle cessé son activité ou l'a-t-elle déplacé ? Je n'avais pas le temps de dépouiller tout l'annuaire.

De façon assez compréhensible, il n'y a pas eu d’annuaire des commerçants (50.000 adresses du Calvados) de 1942 à 1950 inclus. En 1951, Georgette est bien installée place Saint-Martin. Mais il y avait erreur sur le nom de son commerce. Contrairement à ce que me laissait penser une photo envoyée à l'adresse "Mme veuve Sebert, Riva Bella, place St Martin, Caen", son enseigne était "Primavera, bonneterie". Elle se trouvait au stand A. J'ai découvert plus tard dans la journée qu'elle y était domiciliée pour son remariage en 1955. De 1951 à 1954, Primavera bonneterie continue son activité, non loin du stand 28 où est installé le coiffeur Pégouet, avec qui elle vit rapidement après son veuvage et qu'elle épouse finalement en 1955. En revanche, son nouveau mari maintient son commerce au même stand 28 jusqu'en 1957. Le stand A a disparu de la place Saint-Martin. En 1958, je retrouve Primevère bonneterie place Saint-Sauveur, mais je ne suis pas certain que c'est bien Georgette qui le tient. La même année, André Pégouet a déplacé son salon de coiffure route de la Guérinière, où le couple vit désormais et où Georgette décède le 25 avril 1959, déclarée sans profession. J'aimerais retrouver un plan de ces stands de la place St-Martin pour m'en faire une idée plus précise.

J'ai voulu retrouver la tombe de Georgette et suis donc allé au service funéraire de la mairie de Caen, qui se trouve dans le même bâtiment que l'état-civil. J'ai été accueilli à nouveau de façon très aimable par l'une des deux personnes présentes à ce service, qui a cherché avec moi les inhumations de Pégouet, Vaugeois et Sebert. André Pégouet a bien été inhumé à Caen en 1970 dans la même tombe que sa première femme. La concession a depuis disparu et ses restes sont à l'ossuaire. Mais Georgette n'a jamais été enterrée dans ce caveau ni dans aucun autre cimetière de Caen. J'ai toujours entendu dire qu'elle avait été enterrée à Caen et je ne sais où chercher. Voilà un nouveau mystère, Georgette continue à m'échapper même après sa mort ! 

Un bref passage à l'état-civil me confirme ce que je craignais au sujet du préavis de mariage de 1920 : Caen n'a pas conservé les pièces justificatives des mariages, il n'y a donc pas de possibilité de savoir où était Julia, la mère de Georgette, en 1920, au moment du mariage de cette dernière. 

Je reprends la route et après une étape chez un fleuriste, je vais au petit cimetière de Saint-Germain-la-blanche-herbe déposer une bruyère et des bulbes dont j'espère qu'ils résisteront un peu au gel sur la tombe de mon autre arrière-grand-mère paternelle.

Après une petite heure et demie de route et un repas vite expédié dans un bistrot de rencontre, je poursuis mon périple aux archives de Seine-maritime. Cette fois c'est à l'enfance de Georgette que je m'intéresse, en cherchant à reconstituer la carrière de celui qui lui a servi de père, Benjamin Fourneaux, carrière qui ne m'est connue que par sa fiche matricule. J'avais déjà échoué par le passé et j'étais bien déterminé cette fois à ne pas repartir de Rouen sans réponse à cette question : où Georgette a-elle passé son enfance.

Je suis donc parti du principe que la fiche matricule de Benjamin Fourneaux disait vrai. Et j'ai à nouveau regardé, lentement, chaque ligne du recensement de Néville pour 1911. J'ai trouvé deux facteurs, mais ni Fourneaux ni Dauverné ni Vaugeois. Avec une carte des communes sous les yeux, j'ai ensuite commencé à lire les recensements des communes limitrophes ou directes par le train. Au bout d'une heure de ce régime, je n'avais retrouvé ceux que je cherchais ni à St Valéry en Caux, ni Ingouville, ni Bosville, ni Ocqueville, Cailleville, Crasville La Mallée, Drosay, Saint Riquier es Plains, Pleine-Sève, Sainte-Colombe, Saint Vaast Dieppedalle, Manneville-es-Plains, Sasseville. J'avais le sentiment croissant que je ne trouverais jamais ainsi. Et puis un facteur receveur, ça devait avoir une caisse, et donc loger sur place. Il devait donc y avoir une étape de sa carrière dont la fiche matricule ne rendait pas compte. Mais comment combler cette lacune ? Une de mes lectures à la BHPTT m'a donné l'idée de vérifier dans l'annuaire départemental si Benjamin Fourneaux était bien le facteur receveur à Néville aux dates extrêmes de sa présence supposée. 

Une fois encore, l'archiviste de salle m'a aidé avec beaucoup de patience. En 1897, Benjamin Fourneaux est bien à Néville, mais en 1912, ce n'est plus son nom qui figure sur l'annuaire départemental. Je demande alors les annuaires des années correspondant aux recensements : 1901, 1906 et 1911. Benjamin Fourneaux n'est pas facteur receveur à Néville à ces dates là. Fiévreusement, je commence à chercher son nom parmi les facteurs receveurs des autres communes, et je trouve. De 1901 au moins à 1911 inclus, Benjamin Fourneaux est facteur receveur de Brachy. Je retourne à mon poste informatique et demande le recensement de 1901 pour Brachy.

Après quelques pages, le coeur battant, ayant maudit les Fournier qui m'ont donné de fausses joies, c'est enfin ce que je cherche depuis des années. Route de Bacqueville, au bureau de poste, se trouvent quatre personnes :
- Fourneaux Benjamin, 32 ans, chef de ménage, facteur receveur
- Dauverné Pauline, 31 ans, sa femme, sans profession
- Vaugeois Julia, 25 ans, sa belle-soeur, sans profession
- Vaugeois Georgette, 2,5 ans, sa nièce.

Julia, dont je croyais qu'elle avait abandonné sa fille à la naissance, était donc installée chez sa demi-soeur avec sa fille. Malheureusement, le recensement de 1906 ne me dit pas ce qu'elle est devenue,  et  Georgette est désormais seule avec son oncle et sa tante. Il me faudra encore chercher pour trouver ce qu'elle est devenue. L'acte de mariage de Georgette avec André Pégouet en 1955 me confirme qu'à cette date Julia Vaugeois est bien décédée, sans indiquer le lieu. Mais où chercher entre 1920 et 1955 un décès sans lieu connu. Même si je pars du principe qu'en l'absence de mention marginale sur l'acte de naissance de Julia, le décès doit avoir eu lieu avant 1945, ces quinze années me semblent un océan impossible à sonder. J'ai bien sûr vérifié si Julia s'était mariée à Brachy, ce n'est pas le cas. Je m'étonne de l'absence de profession. Vivait-elle de ses fameux deux-mille francs or ?

J'ai bien un maigre indice, le contrat de mariage entre André Pégouet et Georgette Vaugeois. Il est trop récent pour être versé, je vais donc essayer d'identifier le successeur du notaire et de lui en demander une copie. C'est le seul acte où je peux encore espérer trouver une mention précise du décès de Julia et voir si le patrimoine de Georgette comporte des biens venant de sa mère.

Le recensement de 1911 pour Brachy est manquant, mais si je me fie à l'annuaire départemental, je n'ai pas de raison de penser que Georgette n'y était plus. Je me suis offert le petit plaisir d'imprimer le plan et le dessin de façade de l'école de filles de Brachy.

Je suis reparti de Rouen le coeur léger. La joie démonstrative de ma chienne à me retrouver après deux jours de séparation rencontrait la mienne. Je suis heureux d'avoir pu combler d'importantes zones d'ombre dans la vie de Georgette, d'avoir retrouvé, même brièvement la trace de Julia. Je n'oublie pas le grand-père Julien, mais là je ne sais vraiment pas où chercher. Et plus que jamais dans ces recherches, j'accueillerai les suggestions avec plaisir et reconnaissance.

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