Pierre-Rouge 53 : Avant l'enclos Saint-François, l'enclos de Chazelles et sa cité ouvrière

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Amelin "Près le jardin-Riban"- 13 janvier 1822
(Montpellier Méditerranée Métropole – Médiathèque centrale Émile Zola)

Avant l'enclos Saint-François, dont j'ai déjà parlé ici, les terrains où il se trouve ont eu une histoire. Le classement de plusieurs parties de l'enclos en décembre 2021 en donne quelques indications, que j'ai cherché à compléter de mon mieux. 

D'anciens plans du XVIIe siècle lui donnent le nom d'enclos de M. Argellies. Il a aussi été connu sous le nom d'Herme de Prades ou de château Vichet (du nom d'une famille de trésoriers de France à la fin du XVIIIe siècle qui a donné un premier consul à Montpellier et possédait un hôtel particulier rue Ranchin)L'Herme de Prades est cité dans deux plans anciens déposés aux archives municipales. Il est un emplacement possible pour l'ancienne tour avancée dite d'En Candelon, d'après D'Aigrefeuille. Emigré pendant la Révolution, le marquis de Vichet rentre à Montpellier en 1802 ou 1803, mais tous ses biens avaient entretemps été vendus, dont l'hôtel particulier de la rue Ranchin et les bains

Enclos et jardin de M. Castannet (Archives municipales de Montpellier ii 700 - détail XVIIIe siècle)

Ce qui rend difficile à dater plus précisément l'époque où l'enclos porte le nom de M. Castanet. Il semble antérieur à la construction la plus ancienne conservée, enchâssée dans les bâtiments actuels. Il s'agit un bâtiment perpendiculaire à l'avenue de Castelnau, rendu invisible depuis la voie publique par des constructions plus récentes. On le voit bien sur le plan ci-dessus. Dans son contexte initial, le corps de logis était en position centrale avec une allée arborée et un bassin. Comme plusieurs propriétés voisines, les terrains sont délimités par des murs, d'où le nom d'enclos. 

Le jardin Riban sur un plan des alentours de la propriété Alicot vers 1840
(Archives départementales de l'Hérault 1 E 1367 - cliché de l'auteur)

C'est sous l'Empire que le lieu semble avoir pris le nom de jardin Riban. On y trouvait en 1811 une borne milliaire sans doute issue de la voie domitienne datant du règne de l'empereur Constantin (début du IVe siècle). Enrichi par la parfumerie au XVIIIe siècle, les Riban étaient une famille d'amateurs d'art et mécènes, qui figure parmi les donateurs du premier musée de Montpellier. Le peintre Jean-Baptiste Riban, dont le père Maurice hébergea le sculpteur Pajou d'octobre 1792 à octobre 1794 à Montpellier, est-il celui qui acheta le château Vichet pour en faire le jardin Riban ? Son buste par Pajou a été acheté en 2005 par le musée Fabre où on peut aujourd'hui l'admirer derrière une vitrine qui ne facilite pas la photographie sans reflet. 

Amelin "Près le jardin-Riban", sans doute un ponceau sur le Chambéry - 4 mars 1822
(Montpellier Méditerranée Métropole – Médiathèque centrale Émile Zola)

D'après le journal L'Union nationale du 21 août 1876, il existait dans le jardin de l'enclos de Chazelles un monument à Vien (1716-1809), seule peintre à avoir eu les honneurs du Panthéon. Ce moment qui remontait au temps de M. Riban, qu'est-il devenu ?

Je n'ai pas encore trouvé de représentation ancienne du jardin Riban, mais ce lieu fréquenté par les peintres et les sculpteurs a bien dû donner lieu au moins à quelques dessins. Sans doute le dessin d'Amelin du 13 janvier 1822 en représente-t-il l'entrée sur l'ancien chemin de Castelnau.

En 1835, le jardin Riban est l'un des quatre sites pressentis pour aménager un nouveau cimetière. On le trouve alors trop excentré. Il est aussi envisagé d'ouvrir le nouveau cimetière à l'emplacement du jardin Mas, entre la font Putanelle et celui de Mademoiselle Caizergues ou des terrains Lunaret entre le jeu de mail des abbés en la route de Nîmes. Aucun de ces projets ne voit le jour et trois ans plus tard, c'est le site de l'ancienne maladrerie Saint-Lazare qui est choisi. 

Le journal L'Occitanique du 20 mars 1835 nous apprend dans le même temps que MM Roux, prêtres, viennent de transférer leur maison d'éducation du Bosc au jardin Riban à Montpellier. Je n'ai pas trouvé d'autre trace de cet établissement qui semble avoir été éphémère dans ce lieu plus tard consacré à l'éducation.

En 1849, l'occupant non dénommé du "ci-devant" jardin Riban, met en vente une brasserie ayant appartenu à M. Scharvogel, à côté du temple protestant. Il existe au moins deux dessins de cette brasserie par Amelin. 

L'Enclos de Chazelles

Plan de Montpellier en 1854 - détail (succession Planchon - collection de l'auteur)

En 1850, l'enclos devient la propriété de la comtesse de Chazelles-Chuscan. Sur un plan de 1854, dont le cadrage coupe malheureusement la propriété, on peut voir au nord du ruisseau de Chambery une partie des allées bien dessinées de son parc. 

En février 1857, Mme de Chazelles reçoit une indemnisation pour un alignement sur le chemin du mail des abbés, correspondant à la différence entre la portion de terrain cédé à la voie publique et à celle qu'elle récupère dans sa propriété, pour un montant de 6 francs et 27 centimes correspondant à 12,55 mètres carrés. 

Le 29 juillet 1872, la comtesse de Chazelles-Chusclan, née Adélaïde Françoise Etienne Fabre s’éteint à Montpellier dans sa maison de l’ancien chemin de Castelnau. Veuve, elle possédait, outre des propriétés au carré du roi et au Peyrou, à la fois : 
- le vaste enclos portant son nom situé entre le ruisseau de Chambéry, l’ancien chemin de Castelnau et le chemin du jeu de mail des abbés. 
- un ensemble de petites maisons entre l'ancien chemin de Castelnau et le jardin de Madame de Chazelles (la cité ouvrière dont il est question plus loin). 

Le 3 mars 1875, il est procédé au palais de Justice à la vente par licitation de la propriété, définie comme « un superbe jardin » d’une « contenance totale de quatre hectares environ, consistant en une maison de maître, parc, chapelle, serre artistique, bosquets et un jardin potager occupant à peu près la moitié de l’enclos avec puits et eau abondante. » « Cet immeuble, d’un agrément exceptionnel dans la ville de Montpellier, peut être d’un rapport sérieux, par suite du grand et bon jardin potager qu’il renferme. Une grande partie peut être transformée en terrain à bâtir d’une grande valeur. Entrée en jouissance immédiates. Mise à prix 60.000 francs ». 

Par son testament en daté du 8 novembre 1871, la comtesse léguait 2000 francs à l’établissement des Sourds muets et au conseil de fabrique de l'église Saint-Matthieu "la cité ouvrière de Chazelles à la Pierre-Rouge". Plusieurs délibérations du conseil municipal de Montpellier retracent le destin contrarié de ce deuxième legs. Il y manque une description précise, mais on y apprend que la comtesse avait financé la construction de ces maisons le long de l'ancien chemin de Castelnau et les avait affectées au logement gratuit des familles « d’ouvriers pauvres et honnêtes ». La testatrice ajoutait une condition : « au cas où lesdites maisons seraient détournées de leur destination, elle entendait que la première oeuvre de bienfaisance qui le saurait, aurait le droit de revendiquer pour elle, les avantages qu’elle fait »
Organe délibérant de la vie matérielle de la paroisse Saint Mathieu à cette époque, le conseil de fabrique accepte conditionnellement le legs le 5 mai 1873. La commission des finances du conseil municipal examine l’autorisation de ce legs. Les archives ne permettent pas de comprendre exactement ce qui s’est passé, mais le conseil de fabrique finit par retirer son acceptation du legs le 16 août 1874 « étant réduits à l’impuissance absolue de remplir les intentions charitables de Mme de Chazelles » et jugeant le legs trop onéreux. 

En mars 1875, les héritiers de Mme de Chazelles font paraître des annonces dans les journaux pour faire savoir « À toutes oeuvres de bienfaisance qui désireraient se prévaloir des dispositions testamentaires (…) qu’elles peuvent se présenter pour faire connaître leurs prétentions et prendre une connaissance exacte et détaillées desdites dispositions testamentaires ».

Cette recherche demeure infructueuse et le 19 mai 1879, cette partie de la succession Chazelles est vendue. Soit, « une propriété composée de divers maisons formant une cité ouvrière, quartier de la Pierre-Rouge ou Rapillot, confrontant au couchant l’ancien chemin de Castelnau et des autres parts l’ancien jardin de Madame de Chazelles, appartenant aujourd’hui à » Charles Rodolphe Engel, professeur à la faculté de médecine de Montpellier. Leur valeur, 6000 francs, est le dixième de la mise à prix du reste de l'enclos quatre ans plus tôt. 

La cité ouvrière fait place aux bâtiments de l'enclos Saint-François qui longent l'avenue de Castelnau. 

L'ouverture de la rue Polge

Portrait de Numa Polge peint par son frère en 1867
(photo Bruno Ricart, aout 2023, avec son aimable autorisation)

Le jardin et la villa de la comtesse de Chazelles-Chuscan avaient déjà été cédés. En 1875, le futur domaine de l'abbé Charles Prévost est en partie la propriété d'un architecte qui réside au 17 du Cours des Casernes, actuel Cours Gambetta, Numa Polge (1831-1905).

L'immeuble du 17 Cours Gambetta (20 février 2023 - cliché de l'auteur)

On lui doit notamment les bains et lavoirs publics de Montpellier à l'emplacement de l'ancienne boucherie (1856-1859), ce qui n'alla pas sans mal et le fit affronter à plusieurs reprises l'ombrageux M. Cassan, architecte de la ville. 

Plan de l'immeuble du 17 Cours Gambetta du temps de Numa Polge

Parmi ses réalisations, citons encore la mairie école de Clapiers (1876-1884) la station de biologie marine de Sète (1891-1896) et l'ancienne clinique du Carré du roi ou couvent des soeurs de Saint-Joseph (1900). 

Numa Polge a dessiné les plans initiaux de la chapelle Saint-Charles pour le père Soulas, dont l'exécution a été beaucoup plus simple qu'un projet de quasi Sainte-Chapelle. L'engagement catholique de Numa Polge est attesté au-delà de ce projet par sa participation aux travaux du congrès catholique du Midi, en janvier 1875 à Montpellier. C'est également un patriote, qui a donné 500 francs en 1871 pour la libération du territoire. 

Le tracé prévu pour les rues Beauséjour et Léo sur le plan de P A Kruger architecte en 1896
(Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France) 

M. Polge fait rapidement ouvrir une rue prolongeant la rue Lunaret et à laquelle il donne son nom. Une séparation de biens entre les époux Teissier et Trémière au printemps de 1876 témoigne de l'ouverture de cette voie. L'acte décrit une « parcelle de terrain à bâtir d’une surface totale de sept cent cinquante quatre mètre environ, à prendre sur une propriété appelée Enclos de madame la comtesse de Chazelles-Chusclan, (…) qui mesure environ 15 mètres de largeur sur 50 mètres environ de profondeur, confronte la rue ouverte par M. Polge dans la direction de la rue Lunaret, le chemin du jeu de mail des abbés et des deux autres points, Polge. Elle est située au-delà d’une allée de cerisiers à 15 mètres de distance ». La mise à prix est de 3000 francs. C’est le terrain qui a longtemps accueilli la belle villa de la famille Jayet et sur lequel ont été construites deux résidences. 

D'autres belles maisons sur des terrains arborées sont construites dans les années 1880, ainsi qu'une bergerie le long du Chambery qui a plus tard été remaniée pour devenir la salle bleue et les salles de classe du promenoir. 

Donnant sur l'actuelle rue Beauséjour, les immeubles construits à la place de la villa Jayet
(octobre 2018 - photo de l'auteur)

Ainsi le 28 mars 1875, M. Polge fait paraître une annonce dans le messager du Midi pour louer une «Grande villa meublée ou sans meuble, située près le Séminaire et désignée sous le nom d’enclos de Chazelles, avec jouissance d’une serre et d’un superbe jardin ». En mai 1875, Polge renouvelle son annonce en laissant le choix entre la vente et la location. 

Plan de situation de sa propriété dressé par Numa Polge en 1875, l'ancien enclos de Chazelles est figuré en rose
(archives départementales de l'Hérault 2 R 327 - cliché de l'auteur)

Le 3 juillet 1875, Polge écrit au colonel Féraud, du 2e génie de Montpellier : « M. le Colonel, L’administration de la guerre voulant établir à Montpellier d’autres casernes d’infanterie par suite de l’insuffisance et du mauvais état de celles qui se trouvent sur le Cours des Casernes, j’ai l’honneur de vous proposer l’enclos que je possède à Montpellier. Cet enclos est situé à proximité du quartier de la Cavalerie. On y arrive par trois points : la rue du séminaire, la rue Lunaret et la rue de la Cavalerie par une rue en communication directe avec la route de Montpellier à Nîmes, qui aboutit d’un côté à l’école du tir actuel et de l’autre à l’Esplanade où ont lieu les manoeuvres journalières. Toutes ces considérations réunies à la salubrité de l’emplacement, me font penser que votre administration ne pourrait faire un meilleur choix pour cet objet. 
Déjà l’administration municipale s’en est préoccupée et, c’est à l’un des membres de cet (sic) administration que je dois de vous faire la proposition suivante.
J’offre par la présente de céder à votre administration le nombre de mètres carrés dont vous aurez besoin à raison de 6 francs le mètre carré (illisible) sur tout ce qui est teinté en rose sur le plan que vous trouverez ci inclus. 
Dans l’espoir que ma proposition sera favorablement assimilée à cause des avantages qu’elle présente, j’ai l’honneur (etc) ». 

Cette proposition ne sera pas suivie d'effet. 

A cette date, la rue Lunaret, désignée sous le nom de rue Polge, est prolongée du ruisseau de Chambéry au chemin du Jeu de mail des abbés. Polge lotit des terrains et forme des projets pour étendre cette logique. Le plan de 1877 fait figurer deux rues qui semblent n'avoir jamais été réalisées : les rues Léo (du nom du neveu préféré de Numa Polge qui en fit son héritier) et Beauséjour. Le plan de 1896 dressé par l'architecte P A Kruger montre toujours les rues Léo et Beauséjour, mais cette fois en pointillés. La rue Beauséjour a fini par être réalisée, mais comme prolongement de la rue de la Cavalerie entre le ruisseau de Chambéry et la rue du jeu de mail des abbés. Quant à la rue Léo, je ne pense pas qu'elle ait jamais connu de concrétisation.

Par lettre du 9 août 1877, Numa Polge, attentif à la valeur de son bien, s'oppose au projet de chandellerie que veut établir M. Frédéric Fabrège sur l'ancien terrain de Mme Descournuts dans l'ancien Enclos Lunaret. Il est vrai qu'à vingt mètres de là, le charretier Ridasse élève depuis deux ans une quarantaine de porcs sans autorisation, ce qui est déjà une nuisance certaine. Les eaux sales de la chandellerie projetée doivent être utilisées pour le jardin en été et déversées dans le ruisseau de Chambéry par une conduite en hiver. Malgré les protestations de l'architecte, l'avis du conseil d'hygiéne de l'Hérault est favorable pour une installation avec un chaudron de 100 litres. Il y fera fondre les suifs de porc en les chauffant et les additionnant d'acide sulfurique. Appuyé par quatorze autres riverains, Numa Polge insiste et obtient du préfet une deuxième délibération. En juillet 1878, le conseil d'hygiène précise quelques détails techniques, dont la hauteur de la cheminée au-dessus du chaudron qui doit être de dix mètres et dépasser d'au moins deux mètres les toits des maisons les plus proches. Mais l'autorisation est maintenue. 

En septembre 1894, la ville met en demeure le propriétaire de la rue Polge de la mettre en état de viabilité et, faute de réponse de sa part dans le délai prescrit, le défère au tribunal de police. En janvier suivant, le conseil municipal vote un budget de 7000 francs or pour la mise en état de viabilité de la rue Polge (portion de la rue Lunaret de la rue Canton à la rue du jeu de mail des abbés). Finalement, le décompte final des travaux fait réaliser à la ville une économie, la facture de l'entrepreneur Thérond s'élevant seulement à 5618 francs. 

Photo de Numa Polge à la fin de sa vie
(cliché de l'auteur à partir de l'original présenté par la petite nièce de l'architecte)

Cette viabilité ne comprenait pas le tout à l'égout, qui était toujours en projet en décembre 1922. Les 30.000 francs nécessaires sont alors donnés au 2/3 par l'abbé Prévost "propriétaire plus particulièrement intéressé dans cette affaire" avec le concours de l'architecte Julien Boudes. 

J'ai encore connu dans les années 1980 des trottoirs en terre battue dans la partie nord de l'ancienne rue Polge, devenue Lunaret en prolongement de l'autre afin d'éviter la confusion avec une autre rue Polge dans le quartier des Aiguerelles.

Tombe de Numa Polge et de sa famille au cimetière Saint-Lazare (cliché de l'auteur - 19 février 2023)

Veuf depuis 1901, sans enfant, Numa Polge choisit pour héritier son neveu Léo. Par testament établi en 1902, il a aussi légué au musée Fabre deux vases de Sèvres dont la valeur est discutée par la ville pour diminuer les droits de mutation qu'elle doit régler sur ce legs. Le défunt a aussi donné 6000 francs au conseil de fabrique de la paroisse Saint-Denis, à charge pour la paroisse de faire dire cinquante messes par an pour son épouse et lui. Sa libéralité s'étend aussi aux hospices pour un moment de 4000 francs. 

Faire-part de messe de neuvaine pour Numa Polge
(Archives départementales de l'Hérault 131 J 116/2)

C'est par erreur que certains sites donnent les dates de 1872 et 1930 comme bornes de sa vie, le confondant avec un de ces neveux, lui aussi enterré dans la même tombe, mais qui était officier ministériel et pas du tout architecte.

Credo, sculpture de Baussan ornant la tombe de Numa Polge
(19 février 2023 - cliché de l'auteur)

Engel et Aymard, vers un démembrement de l'enclos

Rodolphe Engel (1850-1916) 
(photo utilisée par Laurence Lestel dans Itinéraires de chimistes1857-2007 : 150 ans de chimie en France avec les présidents de la SFC, DR)

Rodolphe Charles Engel, professeur de la faculté de médecine, a acheté une partie de l'enclos. Né en Alsace en 1850, fils d'un agrégé de médecine, il est docteur en médecine de la faculté de Nancy en 1873, pharmacien de première classe l'année suivante, docteur en physique en 1875, agrégé en 1876. Il arrive à Montpellier en 1877 pour y occuper la chaire de chimie médicale et de pharmacie à la faculté de médecine, où il exerce jusqu'en 1889. Il quitte Montpellier pour l'école Centrale cette année là, où il enseigne jusqu'à sa mort en janvier 1916, installé dans un pavillon à Chatillon sous Bagneux. 

Facture du 19 septembre 1888 (collection de l'auteur)

En 1886, il vend à l’horticulteur Jean Marius Aymard une portion de 5500 mètres carrés. Il s’agit d’un jardin potager et jardin d’horticulture, avec maison de jardinier, puits, réservoir et dépendances, longeant la rue du jeu de mail des abbés. C'est proche du domicile de M. Aymard, qui réside quai du Verdanson. 

M. Aymard n'est pas un jardinier ordinaire, c'est un pilier de sa profession. Il a été président de la société d'horticulture et d'histoire naturelle de l'Hérault, directeur des jardins d'essai de l'office agricole de l'Hérault, professeur à l'école normale de Montpellier. En mai 1890, la président de la République lui remet le grand prix d'honneur pour l'ensemble de son exposition ainsi que la médaille d'or pour la première section. Et sa femme reçoit la médaille d'or des dames patronnesses de l'exposition de la part du ministre de l'agriculture. 

En tête de courrier de J. Aymard

En 1913, pour le mariage de leur fille, le nom de M. Aymard est suivi dans la chronique mondaine de la mention de son rang de commandeur du mérite agricole. Son fils est ingénieur agronome et sa fille épouse un journaliste qui occupe aussi un emploi au ministère des colonies. En 1925, Jean Aymard est fait chevalier de la légion d'honneur. Il décède l'année suivante à l'âge de 71 ans. La vie montpelliéraine du 28 août 1926 lui rend un hommage appuyé : il « a été dans notre ville un véritable animateur de l’art du jardin » et rappelle ses « brillants succès aux expositions ». Il est alors retraité mais ses installations servent encore dans l'enclos Saint-François à l'école professionnelle d'horticulture, dont j'ai une facture de l'année 1918.

Mais c'est là un morceau d'une autre histoire, qui commence en 1907 et dont j'ai déjà parlé ici

L'ensemble des sources utilisées pour l'écriture de ce feuilleton, ainsi que les remerciements aux personnes qui ont bien voulu m'offrir leur aide, est détaillé ici.

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